Gravity Daze 2Le premier
Gravity Daze a toujours été mon jeu préféré sur Vita. C'était un jeu à la direction artistique forte et adaptée à sa console et créé autour d'une idée de
gameplay forte qu'il tachait d'exploiter autant que possible. Le jeu n'était pas sans défauts, notamment la caméra trop peu réactive qui rendait les combats vraiment fastidieux et la visée et la glissade au gyroscope vraiment pas intuitive, mais c'était un jeu qui offrait une expérience unique. Un non seulement c"était vrai
open world sur console portable mais en plus il donnait au joueur la liberté de l'explorer librement dès le début, qui plus est non pas en volant mais en
tombant. Cette liberté était vraiment enivrante.
La suite, cette fois sur console de salon et une génération plus tard, se devait de monter encore en gamme et là dessus aucun doute le pari est réussi,
Gravity Daze 2 c'est
Gravity Daze en plus "tout". Plus grand, plus vaste, plus beau, plus riche, plus de trucs à faire, plus de lieux à visiter, plus de façon de jouer avec la gravité, plus tout.
Et si cet excès sublime parfois l'originale, notamment en ce qui s'agit de l'ampleur des environnements, dans d'autre ça fini par surcharger le jeu qui plie un peu sous le poids de ce qu'il propose. Il m'a fallut un poil plus de 50H pour le finir à 100%, en terminant chaque défi ou chaque mission secondaire dès qu'ils m'étaient proposés, quand de souvenir le premier m'avait demandé 20H grand maxi, DLC inclus. En contrepartie il est un bon cran plus facile, surtout les défis qui ne demandent plus de s'acharner pour décrocher les médailles d'or.
Et cette longueur se sent, le rythme du jeu est vraiment moins bon que son ainé. Pas seulement pour la façon dont les missions secondaires et les défis hachent la progression dans l'histoire, mais simplement par son découpage en trois parties (plus un prologue) où à chaque fois tout reprend de zéro ou presque.
Le début du jeu est vraiment pénible, on débute in
media res dans un environnement assez limité et sans pouvoirs gravitationnels, ce qui fait que pendant 30-40 minutes au début on se contente de suivre les marqueurs de quête en espérant que le prochain nous permette de retrouver Dusty et nos pouvoirs pour enfin arrêter de courir dans tous les sens. Plus généralement le début c'est 2-3H à réaliser des quêtes-tutoriaux un peu pénibles avant que le jeu se lance pour de bon. Et tout ça c'est en comptant le fait que le vrai début de l'histoire et la façon dont Kat se retrouve là où elle est a été coupée et mise en scène dans
le très oubliable mais aussi vraiment recommandé prologue animé réalisé par Khara, sans ça c'était bien une heure de plus qui aurait pu s'ajouter à nos peines...
Le gros problème de la structure du jeu est que chaque partie pourrait être un jeu à part entière, elles ont lieu chacune dans un monde différent, coupé des précédant, avec des enjeux narratifs différents et à chaque fois on recommence avec de pénibles quêtes d'exposition de la situation à traverser avant que ça ne décolle pour de bon. Ça rend la progression vraiment pénible par moments.
Par contre l'introduction de quêtes secondaire est vraiment bienvenu, même si elles sont trop nombreuses et qu'elles se résument trop souvent à répéter trois ou quatre fois la même tache pas bien passionnante. Elles sont toutes scénarisées et c'est là que le développement des personnages secondaire se ferra.
Tout ça n'est pas aidé par le fait que le jeu noie le joueur sous les contenu à faire, finir une mission de l'histoire débloque à chaque fois de une à trois missions secondaires et un ou deux défis. Et en même temps il y a les notifications de chasses au trésor, de défi d'autres joueurs et des tempêtes dans les sites miniers (une fausse bonne idée du jeu qui aurait pu être un moyen rapide de miner du minnerais mais qui se révèle très vite trop répétitif et pas assez rentable).
Autre problème : l'écriture. Le premier jeu n'était pas vraiment un modèle du genre avec sa fin qui n'expliquait pas grand chose. Mais là on est un bon cran au dessus dans la médiocrité. Comme dit plus haut il est découpé en trois parties aux enjeux qui ne se recoupent que très peu. Celle à Jirga Para Lhao est l'histoire d'une révolution alimenté par la lutte des classes, celle à Hekseville est un récit plus classique de prise du pouvoir par un manipulateur et la troisième est celle où les origines et le destin de Kat sont révélés. Et c'est au final très décevant. Je ne dirait rien mais le jeu a un mal fou a donner du sens à son histoire et oublie même des éléments au passages. Vous vous souvenez des enfants qui vivent au pied de l'arbre-monde du premier jeu ? Du mystérieux duo de l'anime de Khara ? Rien de celà n'est traité, les premiers verront leur sort réglé dans le DLC de Raven et les seconds sont simplement oubliés. Le jeu essaye bien un truc intéressant en sous-entendant que Raven et Kat n'étaient qu'une seule et même personne à un moment, idée renforcée par la présence d'une mystérieuse Kat aux cheveux noirs lors de certains passages, mais au final il rétropédale et oublie l'idée.
Un thème commun traverse ces histoire, celle de la lutte pour le pouvoir et la question de qui en est le dépositaire légitime. Mais l'écriture très
anime de la chose torpille toute tentative d'en faire quelque chose. Le traitement caricatural de la lutte des classes,
Titanic-tiers, de la haute bourgeoisie égoiste, jusqu'aux enfants, qui vit dans son monde quand les pauvres des bidonvilles se serrent les coudes et ne sont criminels que par nécessité, est trop extrême pour qu'on puisse y croire un seul instant. Et c'est la même chose pour les méchants des parties 2 et 3, trop caricaturaux, trop unidimensionnels pour qu'on ose y croire.
Et puis il y a le
gameplay. Si la partie déplacements gravitationnels est au poil et un plaisir de tous les instants à utiliser, si les glissades sont enfin contrôlables avec la précision que demandent les passages où il faut les utiliser. Mais les combats restent bordéliques, la caméra a un mal fou à suivre les ennemis, ne tourne pas assez vite (on peut augmenter la sensibilité mais c'est la visée qui devient impossible alors) et le jeu refuse toujours une visée à la
Zelda qui aurait tellement facilité la chose (je comprend un peu ce qu'ils voulaient faire avec cette visée "soft" mais en main c'est vraiment une plaie), du coup dès qu'on affronte les nevis dans les airs c'est souvent le bordel et j'ai abusé des pouvoirs de télékinésie gravitationnels améliorés qui sont relativement efficaces et précis cette fois.
Plus tard le jeu donne à Kat une puissante transformation en panthère dont les conditions de déclenchement m'ont semblées plus circonstancielles qu'autre chose. C'est amusant à jouer mais impossible de compter dessus.
Et puis il y a les changements de style de gravité, la vraie fausse bonne idée du jeu. Autant sur le papier ça avait le potentiel de rafraichir un peu la façon de jouer avec un style lunaire qui permet à Kat plus agile de faire des sauts de cabri de plusieurs dizaines de mètres et se téléporter derrière ses adversaires pendant que le style Jupiter démultiplie la force des coups au dépend de l'agilité. Dans les faits ils sont tout deux surtout moins pratique à utiliser et à part les rares instances où le jeu impose leur utilisation ou fait apparaitre des ennemis spécialement faibles face à l'un d'entre eux. Un coup dans l'eau.
Donc si le jeu est mal rythmé, mal écrit et que ses combats sont brouillons, que lui reste-il ? Ce qu'aucun autre jeu n'offre, ce plaisir de monter tout en haut du monde, puis de rétablir la gravité normale et se laisser tomber jusqu'en bas en évitant les immeubles et les aéronefs. Cette ivresse gravitationnelle dans la chute. Ce plaisir de courir à la surface des immeubles, puis en dessous. Ce frison de se catapulter grâce à la gravité, de tout couper, puis de se relancer au moment où on touche le sol, en emportant avec soit une partie du décors et des passants.
Si Hekseville était relativement plate dans sa géographie, tous les quartiers étaient plus ou moins à la même altitude, et que seul le centre-ville et le vieux quartier avaient une certaine verticalité dans leurs designs, Jirga Para Lhao fait arriver le
level design de la série à maturité. Ici toute la ville est organisée verticalement, avec les quartiers du gouvernement et l'armée au sommet, les manoirs des bourgeois en dessous, le quartier d'affaires et ses grattes-ciel et le quartier populaire et son marché au niveau "de base" et enfin les bidonvilles tout en dessous. C'est un peu naïf dans sa représentation du monde, mais en terme de jeu c'est super. On peut monter tout en haut et se laisser chuter jusqu'au plus bas en traversant toute la carte. Et si les manoirs bourgeois et les bidonvilles trahissent un recyclage un peu poussé de certains modèles 3D, le centre-ville est un plaisir à parcourir avec souvent plusieurs niveaux sur chaque "ile". Si il y a bien un point sur lequel cette suite transcende l'original c'est ici, d'autant que la puissance de la PS4 permet de multiplier le nombre de PNJ au sol et d'appareils dans les airs et rend le monde autrement plus vivant.
Et puis il y a l'idée de génie du jeu, donner un appareil photo au joueur et le laisser prendre n'importe quoi en photo puis d'envoyer cette dernière sur les serveurs pour la faire évaluer par les autres joueurs (bon les évaluations c'est "Joli !" et "Pas mal...", c'est un peu l'école des fans). Cet instagram interne au jeu est vraiment fantastique dans la façon dont il permet au joueur de s'amuser et s'exprimer avec l'environnement. On peut bêtement prendre une photo d'un panorama sympa depuis un angle original, s'improviser portraitiste des PNJ, mais c'est l'ajout d'un trépied qui révèle tout le potentiel de la chose en permettant de prendre Kat elle-même en photo et jouer avec le décors, les costumes et les poses. Je me suis bien amusé avec et j'ai vu passer des photos vraiment originales de la part d'autres joueurs. Toutes les images qui illustrent ce poste sont d'ailleurs de moi.
Et si ça ne suffisait pas, cet appareil entre aussi en jeu dans les chasses au trésor. A chaque fois qu'on lance le jeu il va nous proposer 4 photos prisent par d'autres joueurs qui sont un indice pour trouver un trésor. Il faut donc arriver à retrouver là où a été prise la photo pour localiser le trésor. C'est souvent assez facile, les joueurs prenant les lieux les plus identifiables avec le coffre dans le champ pour aider mais certains sont plus fourbes et offrent de vrais challenges. C'est un vrai plaisir que de mettre sa perception de l'espace à l'épreuve dans ces défis (sauf dans les bidonvilles où le fait que tous les bâtiments se ressemblent transforme vite la chose en enfer, j'ai fini par ignorer toutes les chasses au trésor là bas).
Gravity Daze 2 est un jeu plus grand que ses erreurs. Régulièrement frustrant, il fini toujours après un moment un peu relou par offrir une de ses fulgurance dont il a le secret.
Après pas loin de 10 ans sur la série Toyama semble vouloir passer à autre chose et je le comprend, d'autant que ce jeu conclut l'odyssée de Kat. Mais si un jour il lui reprend de vouloir explorer à nouveau ce monde, ou même que Sony confie la série à une autre équipe, je répondrais présent.