Anime : Ghost In The Shell Arise

[Zêta Amrith]

Ghost In The Shell Arise : The Movie

Conclusion de l’itération GITS très mitigée de Tow Ubukata, ce long-métrage est en réalité si dépendant des précédents opus que le terme de TV Special de luxe paraît plus indiqué : déjà difficile à suivre en soi, ses références abondantes à Fire Starter ou l’Unité 501, ainsi que ses hommages aux moutures de Mamoru Oshii et Kenji Kamiyama le destinent en effet aux fans et uniquement aux fans. En résulte un produit intermédiaire et bavard, en décalage avec son format, solidement animé mais duquel n’émerge jamais l’élégance qu’imposerait d’ordinaire un passage par le grand-écran. Les séquences d’action en combat rapproché ou par tanks interposés – en particulier la dernière, sont rentre-dedans, avares de finesse, accusant même parfois une carence en lisibilité. A croire que Kazuchika Kise n’a décidément jamais été très inspiré par les scripts de la lignée Arise, et ce n’est pas non plus la bande-son faiblarde de Cornelius qui contribue à réhausser la présentation générale.

Le film démarre pourtant sur un laïus très intéressant à propos de la globalisation économique, de la guerre souterraine entre nécessités étatiques et voracités privées, tout comme il ébauche aussi une thématique potentiellement passionnante sur les inégalités introduites par l’obsolescence cybernétique. Une note crypto-messianique, le Troisième Monde, est même suggérée au détour de quelques dialogues. Mais sans surprise, l’auteur relègue rapidement cette alléchante tapisserie au grenier, au profit d’un déroulement procédural mêlant virus informatiques et conflits inter-services. Comme d’accoutumée ses deux ou trois idées un peu savoureuses se manifestent surtout à la périphérie du récit, tels des platanes au bord de la route qui n’ont pas d’autres fonctions que décoratives. Au terme de plusieurs péripéties utilisant encore les mêmes procédés – faux souvenirs, marionnettes téléguidées – survient un dénouement minimaliste, sans brio aucun mais à peu près déchiffrable, sur un mode personnel proche de celui de feu SAC. Ni miracle ni armageddon, un bilan finalement moins négatif que ce que l’on pouvait anticiper, permettant à Arise de s’éclipser, du moins le souhaite-t-on, sur l’un de ses segments les moins affadis. Puisse toutefois la franchise repasser entre les mains d’une nouvelle équipe dans les années à venir car celle-là a dit tout ce qu'elle avait à dire.

[Ialda]

Petite question : quand Motoko revoit le fils du premier ministre après l'attentat, celui-ci lui demande de retrouver une copie du décret que celui-ci a essayé de lui envoyer via le net avant l'explosion; j'ai l'impression que le reste du film oublie ce détail ou bien j'ai loupé un truc ?

[Zêta Amrith]

Ce doit être Ishikawa qui le fait off-screen. Puisqu'il me semble qu'à un moment il est dit que le décret portait sur la volonté du gouvernement japonais de mettre fin à l'obsolescence cybernétique. C'est juste expédié à la Ubukata façon "Hop je l'ai trouvé sur le net". Me souviens pas mais c'est sûrement ça.

[Ialda]

Maintenant que tu le dis c'est sûrement ça en effet.

Pas mal de choses à assimiler dans ce film. Comme évoqué avec Saga hier, j'ai l'impression de distinguer les formes générales de l'intrigue, mais assimiler les détails risque de demander quelques visionnages supplémentaires

[Zêta Amrith]

Ceci dit j'ai trouvé ça un peu moins mauvais que les films-OVAs qui ont précédé. Peut-être est-ce l'effet grand-écran mais malgré l'opacité de l'exécution j'ai cru entrevoir pour une fois, l'espace d'un instant, un propos sur le complexe militaro-industriel d'Ubukata. Un élément d'actualité pour le Japon avec son débat sur l'article 9 de la constitution. Ca donne un léger côté Kamiyama-SAC à la production, même si comme toujours avec l'auteur ça reste du vernis et que passée l'introduction rien n'est développé.

Mais il n'y avait objectivement aucune raison d'en faire un film.
Ca ressemble d'ailleurs plus à un super-épisode qu'à un long-métrage cinéma tant rien n'y est présenté.

[Tetho]

L'OVA3 reste mon segment préféré. Il arrivait à raconter une histoire qui se tenait seule et avec une conclusion un peu mélancolique réussie.
Si le film a de bonnes idées, l'utilisation du rôle du complexe militaro-industriel, la mise en avant de l'obsolescente technique ou l'évocation du 3e monde (qui était déjà dans la série, mais traduit en tant que "tiers monde"), l'histoire est dans les choux. Et le duo Kise-Ubukata, qui n'en peuvent plus de réutiliser des scènes du film d'Oshii ou de SAC en sont à réutiliser la scène de l'assassinat en chute libre une seconde fois mais en plus arrivent à se recycler eux même à la fin.
J'aimerais croire que c'est moi qui ne suis pas assez malin et réactif pour suivre une telle œuvre, mais l'écriture de scènes comme celle de la reconstitution de l'explosion où Broma arrive à tracer les mecs qui les suivent à ce moment là en traçant le signal d'une caméra de surveillance cachée qui a été détruite plusieurs dizaine d'heures auparavant me fait dire que non c'est juste le script qui est mauvais.

Mais surtout ce que je ne comprend pas c'est les intentions de Kurutsu.

[Montrer] Spoiler

Dans le premier épisode elle fait éliminer en secret Marumo par les hommes du 501e pour se protéger, elle et ses camarades, vu que si Marumo était reconnu coupable de malversation ses lettres de recommandations donnant pleine indépendance à ses hommes étaient invalidés et le régiment tout entier devenait propriété légale de l'armée.
En sachant rétrospectivement qu'elle était le créateur du Fire Starter et son courtier, ça n'a pas de sens. Pourquoi infecter une personne dont la condamnation aurait tant de conséquences sur ses droits ?

Ensuite à l'épisode 3 on apprend que pendant la guerre au Qhardistan et alors que le Japon intervenait du coté du gouvernement Kuzan, Kusanagi et Kurutsu étaient du coté des rebelles Qhard. C'est là que Kusanagi a mis au point son logiciel de contrôle qui plus tard servira à Kurutsu de base pour le virus Fire Starter.
Là aussi gros flou. Que faisaient ces deux là de l'autre coté ? Étaient-elles là par conviction ? Ou était-ce une opération de barbouzes ? Et dans le premier cas, quelles convictions, dans le second cas, qu'espérait le Japon à soutenir secrètement l'indépendance ?

Dans les épisodes 4 & 5 on apprend que le Fire Starter upload la conscience de ses victimes sur le réseau, à la fois pour évoluer de façon autonome, mais aussi pour les guider vers le 3e monde. De là on peut penser que le but de Kurutsu n'était pas tant son profit personnel en se rangeant du coté du complexe militaro-industriel mais plutôt de guider ceux dont les corps mécaniques ne sont plus en état d'être maintenu en fonctionnement et qui ne peuvent plus passer à un modèle plus moderne un espoir dans la mort.
Mais alors pourquoi en faire tant pour voler l'identité de Kusanagi ?


Et puis la fille paralysée du film, celle qui a vécu tant de vies à travers des corps contrôlés à distance, dit à la fin "on peut utiliser un même corps plusieurs fois mais pas dupliquer un ghost. C'est étrange.". Donc on peut imaginer que ses avatars avaient leurs propres ghosts. Mais alors dans ce cas qu'elle était sa part de contrôle sur ces personnes ?
Et puis à la fin la fausse Kusanagi/Kurutsu essaye de se faire sauter la tête avec son pistolet. Il semble donc logique qu'elle avait un vrai cyber-cerveau dans son crane et n'était pas juste un corps contrôlé à distance. Donc elle est une entité à part entière ? Mais alors que devient-elle à la fin après son arrestation ? On en sait rien, la fille nous dit qu'elle a déjà disparue...
Donc Kurutsu était elle un agent indépendant avec son propre ghost ou juste une marionnette de cette fille qui cherchait à atteindre le 3e monde ?

(et la scène avec la fille qui noye sa capsule de survie n'a aussi aucun sens...)

RHHHA, MAIS J'Y PIGE RIEN DE RIEN BORDEL DE MERDE.

Il y a aussi ses élément non définis, comme l'orphelinat ou Kusanagi a grandi et où les enfants semblent travailler pour le privé. Mais rien n'est clairement établi et ça rend l'histoire dangereusement confuse au lieu de l'étoffer.


Je crois que je vais aller revoir Innocence en fait. A coté d'Arise c'est un Ghost in the Shell qui a la limpidité de l'eau de source.

[Zêta Amrith]

Non mais Arise dans son ensemble est de toutes manières incompréhensible.
Venant d'un auteur low-cost qui renie tous les pré-supposés des vingt-quatre premiers épisodes de Fafner au moment d'écrire le vingt-cinquième, je ne sais même pas s'il est raisonnable d'y chercher une logique. Ne parlons même pas de la façon dont il a éradiqué la franchise Psycho-Pass à jamais.

Pour Kise, et son design loupé qui sont le second naufrage du projet...

Prétendre que l'on peut faire de tout directeur de l'animation un réalisateur, que cela va de soi, est de toutes façons l'une des inepties les plus virulentes de l'animation japonaise moderne. Un réalisateur est quelqu'un qui s'exprime en mots, un lettré, qui conceptualise intellectuellement, argumente et corrige les scenarii dans la direction du message qu'il souhaite délivrer. C'est une totale aberration nippo-nipponne de croire qu'un animateur, aussi doué soit-il, est un réalisateur en dormance. Un bon réalisateur d'animation c'est précisément quelqu'un qui a un pied en-dehors de l'animation. On en revient immanquablement au même sujet, l'animation japonaise crève de ses allers et venues à l'intérieur du même microcosme éteint.

Alors même qu'Oshii se dit prêt à faire un troisième GITS, que de temps, que d'argent et surtout, cette réputation prestigieuse, perdus sur le dernier joujou de Kise et Ubukata.

[Gemini]

C'est une totale aberration nippo-nipponne de croire qu'un animateur, aussi doué soit-il, est un réalisateur en dormance.

Hayao Miyazaki : ancien animateur.
Goro Miyazaki : pas ancien animateur.

[Tetho]

En tant que survivant de Patlabor -The Next Generation- qui attend le film avec un flacon de prozac à la main, je peux t'assurer que tu ne veux pas voir Oshii retoucher à GITS. Pas aujourd'hui, pas demain, jamais. Ce mec est une cause perdue, qu'il retourne tourner ses films live avec des filles qui se battent et nous laisse en paix.
Ouais ça ne peut pas être pire que Arise, mais ça ne sera pas bon pour autant. Sauf si il a fait la paix avec Itô et qu'il veut bien à nouveau travailler avec lui.


Pour Kise et l'aspect visuel de la série c'est ma grande incompréhension. Le charadeisgn est assez inégal, certains personnages sont réussis et d'autres non, mais si le premier épisode était vraiment bien animé, la suite est à peine digne d'une série TV standard et bardé de hors modèle. Même l'épisode 3 que Kise a lui même supervisé. Même le film a ses plans où le visage de Kusanagi ne ressemble à rien. C'est assez incompréhensible. Je me demande vraiment quels genres plannings ont eu l'équipe.


Quand aux réalisateurs, je te rappelle une fois de plus qu'une partie non négligeable des meilleurs réalisateurs et créateurs que ce milieu a connu sont d'anciens animateurs. Miyazaki, Anno, Yasuhiko, Kon... Alors oui être réalisateur ça demande avant tout d'avoir une vision, de savoir ce qu'on veut faire. Mais en soit être animateur n'empêche en rien de devenir un bon réal. Chez ceux qui n'ont jamais touché à une feuille à dessin aussi il y a tout autant de mauvais.

[Zêta Amrith]

Quand aux réalisateurs, je te rappelle une fois de plus qu'une partie non négligeable des meilleurs réalisateurs et créateurs que ce milieu a connu sont d'anciens animateurs. Miyazaki, Anno, Yasuhiko, Kon...

A l'exception du cas particulier de Anno, tous ces gens ont été mangakas, c'est-à-dire narrateurs.
C'est ça l'aspect relevant de leur parcours.

[Tetho]

Sauf que Miyazaki et Yasuhiko sont devenus mangakas après être devenu boardeurs puis réalisateurs. Si ils ont cultivé cette compétence quelque part c'est dans l'animation, pas le manga. Et ça se sent dans leurs mangas d'ailleurs.

[Zêta Amrith]

Miyazaki faisait du manga depuis ses années collège et lycée, même s'il a tout détruit par la suite parce que dixit l'intéressé la mise en cases de Tezuka le rendait vert de jalousie. Accessoirement, ce n'était pas l'animateur lambda mais un intello diplômé en sciences politiques que pas grand-chose ne prédestinait à ce parcours, ce qui rejoint le concept de "réalisateur lettré" que j'évoquais au-dessus. Il me paraît évident que la culture de ces grands réalisateurs, issus d'une époque de transformations où l'industrie de l'anime n'était pas un sous-phénomène évoluant en circuit fermé, n'est pas l'animation japonaise.

[Aer]

Tetho > Pareil pour moi. Je soulignais d'ailleurs qu'au terme de l'OVA 4 ça n'avait déjà pas beaucoup de sens, sans parler des personnages fondamentalement inutiles avec ce seul segment et les plot holes pas fermés/fermés à la hache.
Brayf, je vais pas encore me répéter mais

[Ialda]

Pas sûr si Hosoda et Iso faisaient du manga avant ? Et vous pouvez aussi rajouter Takahata et Ikuhara dans la catégorie des réalisateurs non-ex-animateurs.

Les deux filières réalisateur-issus-de-l'animation et réalisateur-issus-de-la-prod m'ont toujours semblé aussi légitimes l'une que l'autre, même si leur parcours se ressent forcément dans les oeuvres qu'ils produisent : univers construits graphiquement, très expressifs (pas mal de slapstick) chez les uns contre amour du récit à thème chez le "lettré".

[Tetho]

En soit Iso n'a qu'une seule vraie réussite en tant que réal. Je ne veux pas lui ôter le moindre mérite, ni à lui, ni à Dennô Coil, mais on peut envisager l'hypothèse de la chance du débutant. Qu'il sorte de sa grotte et revienne nous éblouir tel Amaterasu.
Pour moi le talent ne se démontre qu'à travers les réussites répétées (c'est d'ailleurs pour ça qu'avec le temps je me dit que j'ai surévalué Shinkai après ses débuts impressionnants).

Et je n'ai pas mentionné Hodosa pour qu'Amrith nous épargne son habituelle rengaine comme quoi il est surestimé.


Amrith > A ma connaissance le premier manga de Yasuhiko est Arion, en 80. Hors à cette époque si il n'avait pas réalisé en tant que réalisateur, il avait storyboardé seul la moitié de Yamato et sa suite, ainsi que les deux premiers films de la franchise (Saraba et Aratanatu Tabidachi). Pendant que Nishizaki et Matsumoto se battaient pour savoir qui tuer et qui ressuscité, il abattait avec Ishiguro le taf qui compte : les storyboards des épisodes.


Aer > Regarde le 5e épisode, celui de la série TV. Tu vas rigoler en voyant comment certains de ces trucs en plans sont expédiés et à la révélation à la fin.

[Ialda]

Hosoda, je rêverais surtout qu'on arrête de le laisser bricoler sur le 原作 de ses films...

[Zêta Amrith]

Et je n'ai pas mentionné Hodosa pour qu'Amrith nous épargne son habituelle rengaine comme quoi il est surestimé.

C'est un bon élève, ses films attirent la sympathie, mais bonjour le ranplanplan.
Yasuhiko a storyboardé mais ça n'est pas une prérogative exclusive de réalisateur.