
Accusé à tort d'avoir trahi sa planète natale, le prince Duke Fleed s'échoue sur Terre à bord du robot Grendizer. Amnésique à la suite de l'impact, il est recueilli par Koji Kabuto et Sayaka, les deux jeunes héros du Laboratoire Photonique ayant défendu jadis le monde contre les attaques du Docteur Hell. Duke refait sa vie mais les forces de Vega n'ont pas l'intention de laisser le "Dieu" Grendizer entre ses mains...
Réalisation : Mitsuo Fukuda (Mobile Suit Gundam Seed)
Scénario : Ichiro Okouchi (Code Geass)
Design : Yoshiyuki Sadamoto (Neon Genesis Evangelion)
Musique : Kohei Tanaka (One Piece)
Animation : Gaina
C'aurait peut-être pu être pire ?
C'aurait surtout pu être tellement plus.
Délicat de donner un avis sur cette oeuvre de commande saoudienne, remake à tout point malade de son format minuscule, un cour, sans comparaison avec les 74 épisodes de l'original. Difficile de distinguer les rares mérites de l'anime de cette affection nostalgique qui l'enveloppe, le Nagai-verse ayant la capacité perverse d'endormir l'esprit critique du spectateur fidèle. C'est comme ça, les fans, il faut d'abord qu'ils s'extraient des palettes de trucs qui obstruent la lecture. Hélas une fois la raison retrouvée, le produit n'est pas fameux, juste passable eu égard au staff all-stars (mais guère passionné par la tâche) qui chapeaute le projet : le rythme est déséquilibré, donnant fréquemment l'impression d'avoir loupé un épisode, le storyboard sans vie, l'animation quelconque au possible, à croire que la pétromonarchie derrière la série a perdu toute sa caillasse au casino.
Les quadragénaires-quinquagénaires ayant connu la version Toei risquent fort de déchanter devant le sort réservé à certains personnages. Danbei a été éliminé du planning et le rôle de Hikaru, que les fans japonais ne portaient pas dans leur coeur, massacré jusqu'à devenir totalement méconnaissable. Au début je me suis dit que c'était excusable, compte tenu du format impossible que devait gérer l'anime, mais c'était avant de découvrir que Okouchi a créé une soeur jumelle superflue à Rubina, laquelle a déjà bouffé deux épisodes au détriment d'antagonistes cultes. Semblable à l'ado d'animuh contemporain lambda, donc dépouillé de tout particularisme extraterrestre, Duke est éclipsé par son babysitter Koji pendant près de sept semaines ; il commence à peine à tenir debout sur ses pattes sans pleurer tandis qu'on file déjà vers la possible conclusion de la série. Quant au protecteur Goldo/Grendizer, symbole de la justice pour nos générations, on le montre très rarement en action. Et jamais pour le voir faire autre chose que se traîner par terre, lors de combats mous comme la gelée, dans la série qui porte pourtant son nom. Après c'est mieux que d'être associé à Hitler par Télérama.
S'il se laisse regarder sans peine grâce au legs émotionnel de son aîné et à l'incompétence de Hydargos, s'il ne fait clairement pas partie des pires opus robotiques de ces dernières années, ce Grendizer U reste l'archétype du remake mal optimisé. Inutilement fourni en quiproquos et en concepts digressifs, cependant qu'il est trop court pour en traiter les implications et donc les faire fructifier dramatiquement. Et alors qu'il perd son temps sur les choses accessoires, ce sont les deux éléments plus importants qui passent à la trappe : Duke et sa machine. Qu'est-ce qu'on s'en tamponne de tes princesses et de ton Gundam Circus, va coucher Okouchi.
Même lorsque l'anime reprend plan par plan la série de 1975, à la faveur d'un hommage bien pratique pour les réalisateurs, la différence de qualité est abyssale entre d'un côté la paire Araki et Komatsubara, qui en vrais artistes placent l'expressionnisme au-dessus des modèles, et de l'autre le nouveau staff, scolaire, anémié par des décennies de lissage et de formatage graphique de l'industrie japonaise.
Que cela ne gâche pas la récréation. C'est du Nagai/Dynamic animé de l'été 2024, et ça roule à peu près pour qui fera l'effort de ne pas regarder en arrière - une aptitude qui m’est étrangère. C'est le paradoxe de Grendizer U à la fois si distant et proche. Il ne peut vraiment déplaire qu'à ceux qui ont vécu son prédécesseur dans leur âme d'enfant mais ce sont les mêmes qui pourraient y trouver un léger quelque chose de satisfaisant. La flamme de la Mazin Saga, il faut croire.