de Zêta Amrith le Jeu 11 Juil 2024, 23:59
Tout le monde est en train de passer à côté en raison d'un manque criant de promotion de la part de SEGA, mais ce Super Monkey Ball Banana Rumble est probablement le meilleur opus de la série depuis vingt ans.
On y retrouve tout ce qui a fait la renommée de la marque, les parcours sinueux, les pièges d'une sournoiserie terrible, sauts de l'ange dans l'inconnu, bifurcations millimétrées, rebonds heureux ou malheureux, physique retorse, mais tout semble avoir été mieux rationalisé, balisé, réaligné au sein d'un titre qui gère mieux que ses prédécesseurs sa courbe de difficulté. Agrémenté de cutscenes destinées aux tout petits (sûrement une excuse pour admirer le redesign des personnages effectué pour cet épisode), le mode aventure comprend 100 niveaux assez accessibles, équilibrés, admirablement conçus dans la perspective d'un SMB s'adressant aux nouveaux joueurs sans priver les anciens de leur besoin de péter les chronos. Le fait de pouvoir jouer à deux en co-op, les options d'aide pléthoriques dénotent une envie de pousser le joueur vers l'avant. Contenu limité ? Non puisqu'à cette histoire principale viendra par la suite se greffer un copieux post-game également composé de 100 cartes, autrement plus difficiles, certains dénivelés infernaux ou labyrinthes impitoyables rappelant les grandes heures de SMB1&2 - mais sans le côté "random" rageant qui pouvait autrefois pointer le bout de son nez au début des années 2000. Les 200 tableaux proposent chacun 3 missions optionnelles presque plus prenantes que le jeu lui-même : ramasser X bananes, obtenir la banane dorée et finir en un temps furtif. Rien ne serait plus faux que d'y voir une astuce vite torchée pour rallonger la durée de vie, c'est un pourvoyeur de challenge (et de crises de nerfs à gogo) qui demande de parcourir les niveaux de manière très différente, en prenant des risques, en testant les tracés à la corde les mains moites, dénichant là où on ne s'y attendait pas le raccourci miraculeux, au prix de loupés affligeants, et c'est souvent brillant.
Surtout que cet épisode introduit pour la première fois une nouvelle action (inspirée d'un certain hérisson bleu), le spin dash. Un boost qui permet de foncer à toute berzingue mais qui nécessite toutefois quelques secondes de recharge. Loin d'être gadget, cette capacité se fond fréquemment dans le level design, et la gamme de raccourcis, de court-circuitages, de bonds spectaculaires qu'elle permet est proprement vertigineuse : reste à voir si on préfère suivre sagement le chemin ou tenter le tout pour le tout. Comme de plus AiAi et les autres disposent de propriétés singulières en vitesse et en poids, on devine des richesses du gameplay qui mettront plusieurs mois à se révéler.
Le mode bataille local/online, qui témoigne de la complexité de faire tourner au poil sur Switch des jeux 3D programmés avec Unity, est quant à lui plus contrasté. Bien que les mini-jeux soient assez satisfaisants sur le principe, en particulier la course à obstacles qui semble prendre le pli de Fall Guys, le FPS souffreteux, l'aliasing anachronique et l'impossibilité, au moins pour l'heure, de choisir le programme de sa session, annulent une bonne part de l'effet recherché, d'autant que hardware Nintendo oblige, on trouve plus de bots que de joueurs en chair et en os durant les pugilats online. SEGA a pourtant misé pas mal de cartouches sur cet aspect du jeu, au point de créer un système de "saisons" déverrouillant de nombreux items de personnalisation inaccessibles en solo ; ceux qui veulent étoffer la déjà volumineuse cargaison d'habillages alternatifs disponible pour leurs singes devront donc en passer par là au moins quelques temps.
A condition de faire preuve de mansuétude vis-à-vis d'une technique perfectible (était-ce raisonnable d'utiliser ces outils sur Switch ?), on a là du vrai Super Monkey Ball canal historique, l'essence de l'arcade, mais glissé à l'intérieur d'une enveloppe qui possède le cachet et l'avenant d'un jeu console. Un fort prometteur redémarrage pour la série après quinze années d'errances plus casual et de remasters.