Zêta Amrith a écrit:Au bout du cent-quarantième fuck et du vingtième gros plan sur un goulot de bouteille, j'étais las.
Jesse Pinkman aurait adoré.

Concernant l'analogie aux réseaux sociaux ou à l'internet, j'irai pas jusqu'à dire que c'était limpide pour moi, mais je vais essayer de te convaincre que ça peut tenir debout ou tout du moins expliquer ce qui m'a fait penser à ça. Cette réticence à la violence qui perturbe le collectif m'a vraiment rappelé les
trigger warnings qu'on voit de plus en plus revendiqués sur internet voire même dans la vraie vie, notamment chez les plus jeunes. Puis, en creusant, je me suis surpris à trouver d'autres similitudes. Ça reste fragile et ne constitue en rien une preuve par a + b, mais j'ai hâte de voir la suite pour voir si ça peut tenir et pourquoi pas filer la métaphore.
Si l'objet était de figurer le grégarisme des réseaux sociaux alors ça tomberait quand même un peu à plat ; les plateformes sont faites de ceux qui s'offusquent pour un rien mais aussi de ceux qui insultent pour un oui ou pour un non, et dans les deux cas tout tourne autour de leur ego. Ces créatures nées de la fusion, sans "moi" et dénuées d'un besoin d'affirmation, sont l'inverse de celles qui existent sur les réseaux sociaux donc l'analogie serait vraiment pataude.
En zoomant sur les individus, ça paraît assez égocentrique, mais en dézoomant, du point de vue des ensembles, y a quand même un certain entre-soi, une profusion de réactions au détriment de réflexions et une propagation d'idées qui, dans la façon dont elles sont exprimées, tendent vers une pensée unique. L'individu devient donc neurone au sein d'un gigantesque système nerveux.
Aujourd'hui, tout a l'air extrêmement polarisé entre des bornes diamétralement opposées, comme si le cerveau avait encore deux hémisphères, mais demain, en réalisant que les comportements et les fins sont peut-être identiques, qui sait. C'est assez dur à imaginer, mais ça reste possible et intéressant à creuser.
Gilligan explique qu'il voulait faire une série très différente du reste de l'offre télévisuelle, mais l'idée de base renvoie à plein de trucs connus, du Prisonnier à Body Snatchers, des films de zombies aux Borgs (Star Trek est nommé dans le premier épisode). J'ai pensé aussi à la fameuse scène horrifique de l'Unité dans les Maîtres du Temps de René Laloux. Et bien entendu au Plan de Complémentarité de Evangelion qui est l'illustration explicite, même si de manière plus spirituelle, du concept.
L'unique innovation viendrait peut-être du fait que c'est traité de façon assez peu manichéenne contrairement aux exemples que tu cites. Après ces deux épisodes, on ne retient pas vraiment une opposition entre une gentille face à quelque chose de méchant, d'inquiétant ou de malfaisant. Ça recoupe peut-être aussi la citation de Mann sus-citée et la façon de procéder du créateur : on raconte une histoire, en orientant le moins possible sur ce qu'il faut croire ou penser. On part d'une situation donnée, on se projette avec le plus de réalisme possible et on voit ce que ça donne à la fin, quitte à choquer ou pas.
Dans la forme, la propagation de la transition et son côté angoissant était vraiment bien développée, mais j'ai trouvé qu'on était quelques coudées derrière ce qu'a pu faire
The Last of Us, en termes de mise en scène et de tension. Après, j'ai enchaîné les épisodes sans rechigner et je n'ai pas vu le temps passer, ce qui est toujours plaisant et bon signe.