J'ai profité de mon abonnement pour regarder le documentaire
Frank & Ollie, sur deux membres des "Nine Old Men", les animateurs favoris de Walt Disney. En fait, je cherchais
Mélodie du Sud, mais je ne l'ai pas trouvé dans le catalogue
Pourquoi seulement deux animateurs ? Contrairement à ce que nous pourrions croire - le documentaire date des années 1990 - il ne s'agissait pourtant pas des derniers, d'ailleurs, les autres n'interviennent pas. Frank et Ollie se distinguent surtout par une solide amitié datant de bien avant leur entrée chez Walt Disney, et le film les aborde en tant que duo créatif, ne cherchant pas à traiter des Nine Old Men dans leur ensemble ou du département d'animation (les intervallistes n'existent pas). Concrètement, cela signifie que le documentaire ressemble plus à un album de famille, une façon pour eux de regarder en arrière et de considérer leur carrière. Bien entendu, il ne s'arrête pas là, puisque les deux artistes nous parlent du processus créatif, de leur façon de s'inspirer de la réalité pour créer certaines séquences, et ils sont invités à fournir quelques détails supplémentaires sur plusieurs d'entre elles.
En cela, le documentaire présente un intérêt historique, et nous en apprend plus sur le métier d'animateur. Néanmoins, il n'est jamais pleinement satisfaisant.
Frank & Ollie ne fait pas tâche dans l'offre de Disney+, et a parfaitement sa place aux côtés de
Dans l'Ombre de Mary, production maison n'hésitant pas à verser dans le révisionnisme pour écrire la légende du patriarche. Quitte à le faire incarner par Tom Hanks. Ce documentaire participe à cette légende.
Ce n'est pas nécessairement conscient. Je ne doute pas que Frank et Ollie aient véritablement apprécié Walt Disney en tant qu'individu, et l'aient considéré comme un grand créateur. Et puis, cela ne se fait pas de dire du mal d'un mort. Néanmoins, la seule vision que nous aurons du travail sous sa direction nous vient d'extraits de vieilles émissions, mises en scène pour mettre en valeur les studios donc probablement éloignés de la réalité. Aucun contrepoint ne sera apporté. Ce qui en ressort, c'est que l'ambiance parait idyllique.
Surtout, le documentariste fait un choix que je trouve extrêmement discutable : celui de se focaliser sur les long-métrages, à plus forte raison ceux restés dans les mémoires. Alors que le film narre la carrière des deux animateurs de manière chronologique, il passe directement de
Bambi (1942) à
Cendrillon (1950), comme si les deux projets s'étaient enchainés. Il s'est pourtant passé beaucoup de choses entretemps, auxquelles ils ont participé ; le studio a continué de travailler sur des courts métrages - notamment des cartoons de propagande pendant la guerre - ainsi que des Grands Classiques, même si essentiellement composés de sketchs tels que
Le Crapaud et le Maitre d'Ecole ou
Les Trois Caballeros. Effectivement, c'est moins glorieux.
Dans le même esprit, pas un mot sur les grèves au sein du studio pour une revalorisation salariale, ou les licenciements qui ont suivi. Ce n'est pourtant pas comme s'ils n'avaient pas vécu cela de l'intérieur.
Alors, peut-être parce qu'ils sont âgés, ils préfèrent se remémorer les bons côtés, un passé idéalisé aujourd'hui révolu. Mais il en résulte une production très lisse, comme si les studios eux-mêmes étaient un ersatz de Disney World.
Je peux comprendre que le propos n'est pas de faire un documentaire détaillé sur le fonctionnement du studio, mais ce n'est pas non plus un documentaire sur le métier d'animateur. Seulement les souvenirs de deux grands artistes, à prendre comme tels et dont il reste possible de tirer des informations précieuses.
Néanmoins, ce que j'en retiendrai surtout, ce sont les extraits des Grands Classiques. Plus le temps passe, plus leur beauté m'impressionne. J'ai versé une petite larme devant un extrait de
Merlin l'Enchanteur dont le simple souvenir suffit à me briser le cœur. Cela m'a donc surtout donné envie de revoir ces long-métrages. Ce n'était peut-être pas le but recherché, mais c'est ce que je retiens de
Frank & Ollie.