Récemment, la curiosité m'a poussé à tester l'adaptation par Netflix du comics
Umbrella Academy. Il ne s'agit évidemment pas de la première série tirée de comics que je regarde, mais jusqu'à présent, l'expérience s'est avérée peu satisfaisante en dehors de l'animation. Ce qui vaut aussi pour les long-métrages. J'avais fini par y voir une forme de fatalité, me détournant de ces séries, en partant du principe qu'elles n'étaient pas pour moi. Pourtant, le processus d'adaptation lui-même ne devrait pas être un problème rédhibitoire, m'empêchant même de donner leur chance à ces œuvres. Selon les personnes en charge d'un projet et les moyens octroyés, cela pourrait tout-à-fait fonctionner.
Umbrella Academy fût une bonne surprise. Déjà, car je n'en attendais rien, je l'ai regardé uniquement car j'avais besoin de prêt-à-consommer à cet instant T. Surtout, une fois que nous avons mis de côté les libertés par rapport aux comics - même si la réécriture est source de quelques incohérences dans le scénario - il s'agit d'une série très appréciable pour elle-même, indépendamment du titre dont elle est tirée. Il y a plus d'idées de mise-en-scène et de soin apporté aux décors, à l'environnement, que dans l'immense majorité des films de super-héros que j'ai pu regarder depuis la Phase I du MCU. Incomparable. C'est souvent inventif, et certains traitements - notamment celui de Hazel et Cha-Cha - ne manquent pas de charme, malgré des personnages trop souvent caricaturaux. Pas la série du siècle, mais j'ai passé un bon moment.
Suffisamment pour que je me dise que cela ne me déplairait pas de tester une autre série TV adaptée d'un comics. Et cette fois, pourquoi ne pas taper directement chez Marvel Comics ou DC Comics ? Am Stram Gram, Pik et Pic, et Colegram (Edmond ?), et j'ai choisi
Doom Patrol. Parce que j'aime bien le comics, parce que j'étais hyper curieux de ce que cela pourrait donner en série TV (dans la mesure où leurs aventures les plus célèbres sont celles écrites par Grant Morrison), et parce qu'il y a Brendan Fraser dans le rôle de Cliff Steele. Tout le monde aime Brendan Fraser. Surtout, cela me faisait plaisir de le revoir après ses nombreux problèmes personnels, ces dernières années. Alors c'est sûr, ça surprend. Physiquement, il est plus proche de
Steven Seagal que de
George de la Jungle.
La série s'inspire principalement du passage de Grant Morrison, mais avec des éléments rapportés et quelques modifications. Impossible de rendre l'essence de l'histoire laissée derrière lui par le Britannique, mais cette adaptation arrive à garder une bonne partie de ce qui faisait son charme, à un point même inattendu. Les responsables de cette série ont apparemment bénéficié d'une liberté surprenante, qui leur permet de ne pas se limiter à des blagues bêtement méta. Cela permet à la fois de placer le lectorat du comics en terrain connu - nous nous attendons à l'apparition de tel ou tel protagoniste - tout en laissant suffisamment de marge pour apporter son lot de surprises. Et des surprises, il y en aura. Pas qu'un peu. Je mets à la place des spectateur·ice·s qui ne connaissent pas la licence, et j'imagine qu'un ou deux détails auront du mal à passer.
Mais je manque à tous mes devoirs. Cliff Steele est un champion de course automobile, et un très mauvais père de famille. A la suite d'un accident, son cerveau - la seule partie de son organisme ayant survécu - est récupéré par le Dr Nils Caulder et placé dans un réceptacle en acier. Bien des années plus tard, il vit encore dans le manoir de Caulder, avec ses autres invités : Rita Farr, actrice à succès dans les années 1950, et Larry Trainor, un pilote d'essai recouvert de bandages. Il fait aussi la connaissance d'une ancienne pensionnaire : Crazy Jane, la fille aux 64 personnalités.
Et ils vont apprendre à devenir des héros. Ou pas. La série tourne à la fois sur les mystères entourant Nils Caulder et son univers, le passé des personnages, et une menace nommée Mr Nobody, criminel raté mais expérience réussie pour un ancien scientifique nazi exilé au Paraguay. Par rapport aux travaux de Grant Morrison, il s'agit d'une œuvre explorant les origines de chacun des membres de la Doom Patrol, et plus uniquement Jane ou les quelques éléments atypiques croisés au fil de leurs aventures. Or, les auteur·ice·s se sont démené·e·s pour en faire des traumatismes ambulants, ce qui est raccord avec l'esprit du comics mais paraitra sans doute lourd, voire larmoyant, pour une partie du public. Je vous aurai prévenu. De nombreux passages paraissent obligés, entre leur quête de rédemption et les relations compliquées avec leur entourage.
S'il n'y avait que ça, ce serait donc plutôt une série dépressive. Et sombre. Effectivement, elle n'est pas très gaie (enfin ça dépend de comment vous l'écrivez), du moins assez souvent. Mais c'est aussi un titre très fantasque et farfelu, avec beaucoup d'idées foireuses et satisfaisantes. De nombreux moments et concepts ne semblent pouvoir exister que dans cette série en particulier et dans aucune autre, avec des pouvoirs improbables, des agences gouvernementales aux activités encore plus improbables, un âne, un cafard, et beaucoup d'humour.
C'est fascinant. Pas autant que pouvait l'être le comics, mais pour une grosse production Warner Bros - enfin, sans doute pas si grosse que cela, compte-tenu du niveau des effets spéciaux - oui, c'est fascinant. Fascinant et fondamentalement différent, avec une réalisation certes inégale d'un épisode à l'autre, mais globalement soignée.
Doom Patrol, ça passe ou ça casse. Si ça passe, il y a vraiment moyen de prendre son pied. Je n'ai pas vu le temps passer.
I think I flexed the wrong muscle.