Zêta Amrith a écrit:VpV a écrit:On verra plus tard pour ce qui est de l'ordre narratif et thématique…
C'est quand même le plus pertinent s'agissant d'une série TV de 1981.
Sûrement, et même si l’exécution est encore assez embryonnaire, les intentions sont là.
Le traitement des personnages dans
Dougram est assez singulier. On ne lit pas en eux comme dans un livre ouvert. On assiste à chaque scène selon un point de vue externe, jamais omniscient. Un peu comme un reporter de guerre qui aurait ses yeux et ses oreilles partout. En fait, hormis Crinn, les personnages sont définis par leurs actes et leurs décisions, pas par leurs pensées. Comme si on avait voulu en faire des personnes plus que des personnages. Il faut attendre le dernier tiers de la série pour avoir droit à des apartés réflexifs et des petites voix intérieures. Ça commence avec Zaltsev et ça se poursuit avec les huiles (surtout Lecoque), mais toujours en de très rares occasions. Avant cela, les intentions de chacun peuvent être suggérées par des éléments visuels (silence accompagné d'un sourire ou d'une moue, allumage d'un cigare, remplissage d'un verre d'alcool, etc.), et c'est tout. Je ne sais pas s'il faut voir ce revirement soudain comme un renoncement ou une révélation, le procédé se révélant assez fastidieux. Il reste que ce parti-pris, tenu pendant une cinquantaine d'épisodes, était assez couillu. On a tellement été habitué à la commodité des répliques introspectives ou réflexives qu'on finirait presque par croire que c'est la seule manière de modeler un personnage ou de clarifier une intrigue.
Le pouvoir est l'un des thèmes clefs de la série. Boyd, Lecoque et Denom sont trois exemples de son exercice.
Boyd est idéaliste et dévoué, mais pas assez sournois. Il est compétent, mais reste un homme de terrain plus que d'entourloupes politiques. Il finit par s'écarter du pouvoir, comprenant qu'en être l'incarnation dans un rapport de domination ne le mène à rien.
Lecoque est brillant et en connaît toutes les facettes, mais il reste obnubilé par le fait de parvenir. Pour lui, le pouvoir semble être une fin et non un moyen. C'est par lui qu'est illustré le côté toxique ou corrupteur du pouvoir. Une fois en position de l'exercer, le pouvoir dont il est investi finit d'annihiler son sens moral déjà vacillant.
Denom Cashim est celui qui s'en sort le mieux, mais il a fait son temps et choisit de s'opposer vainement au sens de l'Histoire, dans l'intérêt des Terriens. D'une main de fer, il semble dompter le pouvoir et éviter les abus jusqu'au bout, raison pour laquelle il garde le respect de tous, malgré son obstination impitoyable.
Ce que semble aussi dire
Dougram, c'est que l''indépendance est à mener sur deux fronts. On en suit toutes les phases, du soulèvement d'individualités à la constitution d'un gouvernement alternatif et indépendant.
Le combat est nécessaire à l'indépendance, c'est même sa manifestation la plus pure et c'est ce qui donne l'impulsion, mais il ne suffit ni à l'asseoir ni à lui donner corps. La série met en parallèle le champ de bataille et l'échiquier politique. Lorsque les deux mondes finissent par converger, la guerre change de forme. Fini la guérilla, les combattants guidés par leurs seuls idéaux deviennent par nécessité des soldats dirigés par des ordres, la main armée d'une véritable structure politique. Ironie su sort, le rapport de force s'inversant, les militaires de la fédération se retrouvent à mener des opérations de guérilla contre les guerriers devenus soldats.