de Zêta Amrith le Dim 21 Juin 2015, 02:22
Avril Et Le Monde TruquéRéalisation : Christian Desmares et Franck Ekinci
Scénario : Frank Ekinci et Benjamin LegrandSortie le 11 Novembre 2015.
Des savants disparaissent aux quatre coins du monde, dans un 1941 uchronique où la famille Bonaparte gouverne toujours le grand Empire de France. La jeune Avril, accompagnée de son chat surdoué et d’un pick-pocket opportuniste, se lance à l’aventure pour retrouver ses biologistes de parents, perdus de vue au terme d’une course-poursuite avec la police.Difficile de faire le procès de la facilité à ce long-métrage français très ambitieux, situé dans le cadre atypique d’un Paris napoléonien steampunk bordé de téléphériques géants, de rouages et de poulies en tous genres, de chats qui parlent et de bibliothèques surannées, le tout majoritairement fabriqué main via une large sous-traitance asiatique. Basé sur l’univers graphique de Jacques Tardi, le film est un indéniable tour de force pour ce qui est de sa réalisation, agglomérant fines compositions de la BD franco-belge et folie des grandeurs du cinéma d’animation japonais dans une dualité colométrique de rouge et de gris du meilleur goût. Ainsi, il ne faut pas plus de quelques minutes pour s’imaginer en futur e-défenseur de cet
Avril audacieux comme peu de ses contemporains peuvent s’en prévaloir... sauf que.
Dans sa seconde moitié l’histoire prend un tour assez différent, beaucoup plus convenu qu’elle ne semble l’admettre, mais qu’on ne saurait aborder ici sans spoiler la totalité du film. Eventuellement ludique pour les enfants, cette digression fantaisiste m’a très moyennement convaincu en cela qu’elle crée une cassure esthétique à l’intérieur du récit et rend plus compliqué à identifier le réel propos du film. Autre élément possible de discorde : un doublage globalement atone et didactique, comme l’hexagone les affectionne parfois, campé entre autres vedettes par la pénible Marion Cotillard qui ne rend pas souvent service à l’image. Rien de cela ne remettra en cause la témérité des réalisateurs, qu’il faudra suivre à l’avenir, mais le produit terminé se montre un peu trop lunatique et dispersé pour confirmer toutes ses promesses de neo-
Tintin SF échaudé par la vapeur. Si tous les ingrédients du succès sont sur la table, leur dosage discutable fait que l'on passe à quelques encablures du classique. Par exemple, pourquoi ne pas avoir donné un rôle plus important au policier monomaniaque, à fort potentiel comique, plutôt qu'aux parents d'Avril, confondants de banalité et d'ennui ?
Avril Et Le Monde Truqué, le Cristal d'Annecy 2015, doit être soutenu en raison de ses intentions et des efforts graphiques stupéfiants qu’il consent à livrer pour se démarquer du reste de la production, mais en ayant conscience qu'il ne vise pas exactement au coeur de la cible. Il n’en demeure pas moins un acte de bravoure et l’illustration encourageante de la grande ébullition à l’oeuvre dans l’industrie de l’animation française depuis une douzaine d’années.