L'Arte Della Felicita

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Zêta Amrith
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L'Arte Della Felicita

Messagede Zêta Amrith le Sam 14 Juin 2014, 01:32

L'ARTE DELLA FELICITA

Réalisation : Alessandro Rak
Production : Big Sur - Mad Entertainment


De tous temps, deux écoles de pensée se sont affrontées à propos du bonheur. Il y a ceux qui affirment qu'il se cultive, s'entretient, se mérite, et ceux qui croient qu'on naît avec ou sans, dépourvu de toute possibilité d'infléchir sa nature profonde.
Ancien pianiste, Sergio est devenu chauffeur de taxi depuis le départ de son frère aîné pour le Népal. Las et déprimé par une réalité vide de sens, il passe ses journées dans sa vieille voiture, à écouter les prophéties mystiques de l'animateur-phare de la radio napolitaine "L'Art Du Bonheur"...


Terminé fin 2013 par une équipe peu chevronnée mais consciencieuse, ce long-métrage italien fit un peu parler de lui sur les sites spécialisés en raison de son choix de réhabilitation intensive d'une technique dont on considère souvent depuis la CGisation de l'industrie qu'elle est tombée en désuétude : la rotoscopie. Très largement animé à partir de séquences live, donc, par une quarantaine de jeunes gens, L'Arte Della Felicita est, sur le plan esthétique, l'un des films les plus aboutis, et les plus posés qu'il m'ait été donné de connaître parmi ceux usant de cette méthode controversée.



Sur le papier, le synopsis vaut les pages Développement Personnel du plus mauvais magazine féminin : on imagine un film vaguement bouddhiste, pseudo-aérien, déployant aphorismes et sermons sur le bonheur, la compréhension de l'autre, la communion avec la forêt, sur l'impérieuse nécessité de ne se focaliser que sur l'instant présent etc... où il ne manquerait guère que le yoga pour faire le tour complet du patelin. Et pourtant, si ces choses existent en filigrane du métrage, elles ne sont jamais imposées, de même que les considérations spirituelles du récit sont beaucoup plus intellectuelles, politiques, riches en mélancolie, que prosélytes, naïves ou doxocompatibles. En froid avec sa famille pour des motifs révélés vers la toute fin du film, Sergio erre dans une Naples sombrante en essayant de piocher des morceaux de vérité dans une poignée de souvenirs et les confidences de ses passagers. Il en résulte un long-métrage émotionnellement touchant, tantôt désabusé tantôt plus souriant, et très compétent pour ce qui est d'éviter la lourdeur que de telles préoccupations entraînent le plus souvent. Souvent juste, car jamais trop démonstratif.

Bien entendu, le débat sur la technique rotoscopique demeure ouvert, au sens que le procédé n'a jamais et ne fera jamais l'unanimité parmi les amateurs d'animation, même lorsqu'il offre comme ici moultes séquences naturalistes d'une acuité permise uniquement par ce biais là. Il n'en demeure pas moins que L'Arte Della Felicita est un film pour adultes de haut niveau, à l'humour aussi discret qu'authentique et aux dialogues parfois remarquables *. Une bonne surprise pour peu de faire sien le rythme du réalisateur.

*
[Montrer] Spoiler
"A quoi bon avoir l'oreille musicienne lorsque cela t'empêche d'écouter ce qu'on te dit ?"
"L'Apocalypse ? Tant que des pianistes deviendront chauffeurs de taxi, elle est inévitable".


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