TANTE HILDA
Réalisation / Scénario : Jacques-Rémy Girerd et Benoit Chieux (La Prophétie Des Grenouilles)
Production / Animation : Folimage (Mia Et Le Migou)
Hilda, botaniste amoureuse de la nature, conserve dans son musée végétal des milliers de plantes venues des quatre coins du monde. Parallèlement, la multinationale DOLLO crée dans ses laboratoires une super-semence génétiquement modifiée, Attilem, dont ses inventeurs affirment qu'elle mettra définitivement un terme à la faim dans le monde. Une catastrophe écologique ne tarde pas à arriver.
Studio d'animation réputé dans l'hexagone, Folimage est aussi, depuis 2012, une marque connue du grand-public du fait de la nomination aux Oscars US du long-métrage Une Vie De Chat. Le dernier né, Tante Hilda, sur lequel le fondateur du studio Jacques-Rémy Girerd travaille depuis sept ans, arrive donc dans un contexte spécial qui est celui de l'intronisation récente de Folimage dans la cour des grands. La sortie du film en salles est prévue le 12 Février 2014.
D'emblée, je dirais que le film m'est très difficile à commenter.
A la fois hyperbole censée parler aux enfants dans ses moments d'exhubérance et réquisitoire dirigé contre Monsanto
et Goldman Sachs, Tante Hilda est tantôt charmant lorsqu'il se montre naïf, simple et bucolique, tantôt un peu pénible lorsque la dénonciation prend des allures de sermon trop appuyé. On a beau pouvoir adhérer à la plupart des affirmations contenues en filigrane dans le script, le fait que le propos du réalisateur prenne régulièrement le dessus sur l'histoire qu'il raconte peut s'avérer gênant ou intrusif de temps à autre. Le propos du réal', parlons-en justement : plus que l'écologie elle-même - qui n'est pas un thème nouveau chez Folimage - la particularité du film est de présenter un monde politique entièrement dominé, manipulé voire acheté par de grandes entreprises tentaculaires ne répondant plus à aucun Etat ni éthique. La PDG repoussante et difforme de DOLLO, sorte de Cruella financière menant les institutions et les médias à la baguette, résume à elle seule l'accent volontairement très caricatural du récit ; coupée du reste du monde, elle passe son temps à se baffrer, prendre des bains de mousse et compter les bénéfices, flanquée d'un demi-scientifique opportuniste ressemblant étrangement à Jean Sarkozy (?) et de deux hommes de main débiles tout droit sortis de Yatterman ou autre 'manga' du même type. Cette peinture là, que les ennemis des peuples seraient immédiatement tentés de qualifier de populiste, est néanmoins tempérée dans le dernier tiers du film, lequel adopte une tonalité moins politique pour revêtir les oripeaux plus traditionnels du conte et un esprit beaucoup plus "dessin-animé". On se montrera quand même plutôt réservés vis-à-vis de la présence parmi les doubleurs de personnalités telles que Josiane Balasko, militante pro-Solférino dont la dénonciation indirecte de la spéculation sans visage frôle de facto ici la mauvaise blague.
Dans ce contexte assez chargé, les deux personnages principaux, Hilda et son petit ami platonique, un savant russe et dégarni habité d'une conscience qui le pousse à condamner les expériences OGN de DOLLO, subissent les évènements davantage qu'ils n'influent sur eux. Leur "couple" de quinquagénaires issus d'univers inconciliables est probablement la plus belle trouvaille du film, lequel aurait mérité d'y consacrer plus de substance.
Au final, et à la veille de l'aberration que constitue l'adoption par l'Union Européenne du Traité Transatlantique, on aurait tendance à penser que Tante Hilda Contre Attilem est l'archétype du film nécessaire mais qui n'avait pas nécessairement besoin de procéder ainsi. Ceux qui voudront passer outre ses quelques didacticiels un tantinet prosélytes lui sauront gré d'exister au bon moment et ne manqueront pas de saluer à nouveau la longévité de la plus noble résistance qui soit chez Folimage, celle d'une animation fabriquée main. Il fallait le faire, c'est sûr, mais était-ce la bonne manière ?