Zêta Amrith a écrit:Le plus biaisé est de feindre de croire que ces vaccins empêchent la transmission, lorsque les chiffres en provenance des pays les plus avancés dans leur campagne, par exemple l'Irlande ou Israel, démentent ce point.
C’est ennuyeux, mais c’est acté depuis déjà quelques mois. Le "seul" bénéfice de la vaccination dans le cas présent, si seulement il fallait en minimiser l’intérêt, c’est bien de limiter (a priori très nettement) les risques de formes symptomatiques graves nécessitant une hospitalisation. L’exemple Israélien ne vient me semble-t-il pas démentir cette petite évidence, qui voit les services Covid de tous pays être désormais très majoritairement composés de non-vaccinés, en proportion de ce qu’ils représentent encore dans les pays concernés. Ça ne rend certes pas les réticents les plus militants responsables du délitement de l’hôpital public (parce que
"Oulala, on n’a plus d’argent", en effet), mais c’est encore plus loin d’honorer les discours prônant la "liberté", quand ils sont toujours conjugués à la première personne du singulier.
En l’occurrence, je pense que la France compte une population de réfractaires aux vaccins – en général – qui n’a rien de négligeable et, en bon gauchiste que je suis, j’ai toujours eu tendance à penser que ces phénomènes sont plus intéressants à analyser qu’à basiquement dénoncer. C’est comme pleurnicher que
les gens votent FN/RN ou que les jeunes à capuches dans les cités s’entêtent plus qu’ailleurs à faire carrière dans le petit banditisme : les constats – pour autant qu’ils en soient bel et bien – ne valent rien si on ne se demande jamais ni pourquoi, ni comment. Alors je sais que j’entre là dans une grille de lecture partielle qui m’est certainement personnelle et subjective, mais ayant déjà pu approcher nombre d’anti-vax’ plus ou moins radicaux, dont certains ont pris position depuis de nombreuses années, je fais une différence entre celles et ceux qui interrogent les excès et scandales de l’industrie pharmaceutique (et comme ils sont assez pléthoriques en plus d’être assez bien documentés, il est assez facile de comprendre ce qui les anime) de celles et ceux qui ont un discours radicalement libéral, avec du "Moi je" partout en guise de justification quasi-systématique. Des personnes que les notions d’intérêt collectif n’effleurent même plus, même si j’aurais bien du mal à le leur reprocher.
La paupérisation délibérée des services publics, l’individualisme forcené par lequel on redéfinit ce que seraient le mérite et la responsabilité, l’insistance avec laquelle on nous oppose qu’il faudrait
"sortir de l’assistanat" dès que l’on parle de bien commun et de cohésion sociale… Tout ça ne peut que concourir à banaliser le "Démerdez-vous" et le "Je fais ce que je veux", qui sont les deux pendants d’une même idéologie. Je ne m’y résous pas, parce que j’ai le défaut de penser que des structures collectives saines sont de précieux garde-fous, mais comment ne pas voir que l’argument ultra-simpliste du
"Chacun est libre de se faire vacciner ou non", d’autant plus quand il est tenu de façon naïve mais bienveillante par des non-militants qui réagissent spontanément à la situation, procède d’une façon de raisonner à l’échelle strictement individuelle ? Mais c’est ce que produisent nos sociétés : de l’individualisme, y compris dans sa version Bisounours. J’ai même tendance à me dire que c’en est la version la plus répandue.
La campagne soi-disant absolument nécessaire de vaccination massive n’a d’ailleurs pas été promue autrement: débrouillez-vous sur Doctolib – une plateforme privée – et soyez responsables, à vos frais et au gré des disparités qui verront certains obtenir des créneaux disponibles sans suer une goutte, quand d’autres devront composer avec leur propre incompétence et les manquements de territoires laissés à l’abandon.
D’ailleurs, c’est drôle, quand je lis ça :
Rhyvia a écrit:Le télétravail laisse trop de place à l'émancipation, retournez à votre bureau pour qu'un débile à cravate vous ordonne de faire un travail qu'il n'a jamais fait et ne fera jamais.
… Bah moi, je vois surtout un "transfert de charges" où il faut posséder soi-même le matériel informatique nécessaire, a minima, sinon des outils de travail plus spécifiques encore. Il y a tout une frange du patronat pour qui le télétravail c’est effectivement "l’émancipation" parce que bon, tu imagines les économies si on s’épargne le financement d’une photocopieuse, de postes informatiques, d’un réfectoire commun etc. ? Et plus encore, quand on s'évite de payer des locaux quand le m² à Paris s’évalue autour de 10 000 euros ?
Au passage, le télétravail s’envisage principalement dans un univers professionnel largement tertiarisé, chose qui s’est développée en France au prix d’une désindustrialisation quasi-assassine.
Je conçois que chacun ait sa propre appréciation de la chose, mais je n’ai pas l’impression que le télétravail libère de l’aliénation au travail : au contraire, il l’importe chez toi, et à tes frais. Moi je l’ai vécu comme une intrusion d’autant moins confortable qu’avec deux enfants de 2 et 4 ans "confinés", il a fallu cravacher encore plus. Et surtout – je le répète – il a fallu que je me démerde pour m’aménager un semblant de bureau fonctionnel, restant à la merci de la moindre panne et plus ou moins contraint d’installer Zoom sur l’ordi familial.
Expérience très pénible pour ce qui me concerne, donc. Pas que je sois quelqu’un de particulièrement zélé (si j’avais le choix, je passerais mon temps à autre chose, crois-moi), mais tant qu’à être contraint de bosser pour le Dieu PIB, je préfère que ce soit au bureau.