Zêta Amrith a écrit:La tactique la plus opérante pour ces 'Gilets Jaunes' sera probablement d'activement refuser de se structurer, voire de cultiver l'absence de lisibilité pour brider les moyens de l'exécutif.
Dès l'instant où la question d'avoir une "tactique" se posera - ce qui est déjà largement le cas - le mouvement risque l'auto-destruction, justement parce qu'il n'est basé sur rien d'autre qu'un vaste "Y'en a marre" hétéroclite au possible, malgré quelques évidents points de convergence. Un sentiment qu'ils peinent d'ailleurs beaucoup à étayer, et dès qu'ils essaient de formuler une ligne politique vaguement cohérente, on mesure l'impréparation totale de la chose.
Mais paradoxalement, c'est la spontanéité et l'amateurisme naïf du mouvement qui le rendent authentiquement fascinant, avec tout ce qu'il a de plus moche. Parce que, pour une fois, le "peuple" (ou une frange majoritaire de celui-ci, en tout cas) donne à être vu pour ce qu'il est vraiment. Pas pour ce qu'on dit qu'il est sûrement. Et voir la caste d'en haut "aussi perplexe qu'une poule devant un démonte-pneu" (comme dirait Lordon) en essayant de comprendre ce que veulent ces gueux sous-diplômés qui s'agitent sous leurs fenêtres, c'est déjà beau en soi.
Mais j'ai du mal à croire qu'il puisse en sortir grand chose. C'est pourtant typiquement une colère difficile à saisir et donc déstabilisante, qui donne l'impression qu'il peut se passer "un truc". Sauf que ces gens ont la rage contre un système qu'ils n'arrivent même pas à identifier comme tel. Leur cible, c'est un nom - celui d'Emmanuel Macron - comme si cet avatar avait la moindre importance au regard de ce que génère un mode de production et des rapports de force institutionnalisés. Je vais rabâcher ce que je disais déjà quelques posts plus haut, mais tant qu'on pensera qu'il faut virer machin pour mettre bidule, on finira par perdre le fil idéologique pour en revenir à l'insignifiance électorale, avec de la probité et du moralisme dedans.