
Réalisation : Keiichi Satou (Tiger & Bunny)
Scénario : Ikuko Takahashi (Library War)
Animation : Toei Animation
Voix : Masako Nozawa, Megumi Hayashibara, Kinya Kitaoji
D'après le manga de George Akiyama
Le Japon de l'ère médiévale. La famine, l'esclavage et la maladie comme seul horizon. Enfant sauvage, Asura naît dans cet enfer où la faim conduit les humains aux pires extrémités...
Comment faire valoir les concepts de Bien et de Mal dans un univers hostile où la survie l'emporte sur la morale.
C'est le thème qui traverse d'un bout à l'autre le très bon film de Keiichi Satou, pour le coup assez éloigné des canons indolents que l'animation japonaise grand format nous propose d'ordinaire dans son circuit commercial. Pour sûr, ça ne rigole plus et les super-héros sont tous morts, à croire que le chat tout sourire qui sert d'emblême à Toei Animation s'est trompé de programme. Si les premières secondes sont un calvaire pour l'anime-fan gardien du temple - le métrage est presque intégralement réalisé en cel-shading - la suite tend à justifier l'usage de cette technique par les saillantes particularités du contenu : sombre à satiété, authentiquement gore et inmontrable aux marmots, le film n'aurait sans doute jamais pu voir le jour en 2D, son script incapable de recueillir les fonds nécessaires. En effet, on imagine mal les sponsors se précipiter pour financer, la main légère, une oeuvre dont la plupart des spectateurs se souviendront d'abord des séquences de cannibalisme, du commerce de femmes et des teintes crépusculaires. Paradoxalement, de par sa raison d'être, la computique fait donc plutôt pencher Asura du côté des anime de la résistance que de celui des anime de la trahison... c'est d'autant plus vrai que l'on signale aussi la présence de quelques plans tout bonnement magnifiques.
Simplissime, sans surprise, à peine enrichie de quelques sutras bouddhiques, l'histoire est d'une efficacité redoutable puisque profondément aphorique, mais surtout compacte, uniquement centrée sur le personnage de Asura : enfant-animal pour les uns, démon pour les autres, convaincu d'être maudit par le sacerdoce qu'est la vie, mais au fond, l'un des rares spécimens susceptibles de mieux là où tout autour le monde décline inexorablement vers les abysses. Les rares personnages secondaires n'accaparent jamais le focus et n'existent que pour confronter Asura à propos de ses actes et de la position qu'il entend adopter vis-à-vis de la société humaine qui l'a rejeté. Le scénario relevant davantage de l'exposition étayée que de la véritable narration, et le contexte l'emportant sur les rebondissements, en dire plus serait forcément en dire trop - aussi m'en tiendrais-je là pour le moment.
En bref, Asura vaut la peine qu'on lui pardonne son régime CG.
Même s'il ne manquera pas de faire un bide au Japon, son côté casse-cou n'aura peut-être pas été vain.