de Gemini le Dim 19 Sep 2021, 18:32
Depuis maintenant plusieurs années, récupérer une licence (prometteuse) du Shônen Jump est un véritable enjeu pour les principaux éditeurs français, et avec les coûts de promotion associés à la licence elle-même, cela doit représenter une sacrée prise de risque financière. Autant dire qu'ils ont tout intérêt à crier au chef d’œuvre à chaque fois qu'ils en obtiennent une, quitte à perdre toute crédibilité à force de répéter la même chose. C'est dans ce contexte qu'a débarqué Jujutsu Kaisen chez Ki-oon, et si j'ai hésité à commencer le manga, l'extrait proposé par l'éditeur ne m'a pas convaincu. Par curiosité, je viens malgré tout de voir l'anime. Et je ne regrette pas de ne pas m'être lancé dans le manga, même si quelques détails me laissent penser que celui-ci peut être un cran meilleur.
Par rapport aux autres titres du genre "action mais un peu drôle quand même car les personnages ont tendance à faire les cons", celui-ci propose les habituels protagonistes bizarres et hauts-en-couleur, l'énergie spécifique à maîtriser, la montée en surpuissance,... du classique. Là où il se démarque, c'est dans sa violence. Une violence globalement inoffensive, puisque que les héros possèdent plusieurs moyens de restaurer leur intégrité physique (en tout cas dans l'anime), et qu'elle touche avant tout des personnages dont le pouvoir de nuisance nous a été démontré (en mode "c'est bien fait" alors que pas du tout quand nous y pensons), ou des quidams pour qui nous n'avons aucune attache. Le scénario ose malgré tout aller plus loin, en confrontant le principal protagoniste à un véritable traumatisme, pour lequel aucun retour en arrière n'est possible. Ce n'est pas si fréquent. Et même si ce n'est pas aussi perturbant que dans un FMA, cela surprend dans une série jusque-là assez consensuelle (d'autant plus que le studio nous met sciemment sur une mauvaise piste à travers son générique de début). En contrepartie, la réalisation n'assume pas totalement cette violence moins frontale, plus psychologique, au point de laisser certains points hors champ. Et compte-tenu des pouvoirs de l'antagoniste responsable de cette situation, il y avait moyen de proposer quelque chose de beaucoup plus dégueulasse et insupportable.
Néanmoins, il s'agit sans doute d'un des rares points permettant à la série de se montrer imprévisible. Pour le reste, hormis quelques pouvoirs pas toujours en phase avec le style des personnages, nous n'avons rien de bien original à nous mettre sous la dent. La série tombant même dans un écueil assez énervant en passant plusieurs épisodes à faire combattre des personnages pourtant alliés ; et si la justification pour s'en prendre au héros s'avère légitime, ce n'est pas le cas de toutes les confrontations, et la moitié d'entre eux se trouve au tapis lorsqu'une menace réelle se présente. Tant de connerie, ce n'est plus drôle, c'est juste crispant.
Cela fait partie des archétypes de ce type de shônen manga ; depuis Dragon Ball (entre autres), les groupes d'alliés sont souvent composés d'anciens ennemis / adversaires. Et ces archétypes font aussi de Jujutsu Kaisen une série rythmée, très efficace malgré ses défauts et dont les épisodes s'enchaînent rapidement. Mais les défauts en question ne sont pas une fatalité, toutes les séries n'en souffrent pas. L'effet de répétition joue aussi en la défaveur de celle-ci en particulier ; il n'en irait pas de même s'il s'agissait d'un de mes premiers shônen manga appartenant à cette catégorie. Seulement, comme dit tantôt, ces défauts ne se retrouvent pas systématiquement dans chaque nouvelle série, ou alors, certaines ont suffisamment de répondant pour nous offrir quelque chose transcendant leurs imperfections.
Pour ce qui est de la technique, cela bouge bien, ce qu'il faut pour une série d'action, mais cela se fait au prix d'une débauche de CGI dont l'ajout dans une scène tranche avec le style habituel de l'animation et se voit comme le nez au milieu de la figure. Si cela ne concernait que les attaques, les monstres, ou les manifestations du pouvoir spécifique à la série, cela pourrait passer pour un effet de style, même si cela a déjà été fait. Sauf que, selon les plans, cela concerne aussi les armes, les personnages humains,... rien de bien surprenant, mais jamais très agréable.
Je n'ai pas passé un moment désagréable devant Jujutsu Kaisen. C'est classique mais suffisamment bien fait pour maintenir l'attention. Par contre, je n’achèterai pas le manga.