Les Enfants De La MerRéalisation : Ayumu Watanabe (
Space Brothers)
Scénario : Ayumu Watanabe, d’après le manga de Daisuke Igarashi
Chara-Design : Kenichi Konishi (
Le Conte De La Princesse Kaguya)
Animation : Studio 4°C (
Genius Party)
Ruka, jeune lycéenne, vit avec sa mère. Elle se consacre à sa passion, le handball. Hélas, elle se fait injustement exclure de son équipe le premier jour des vacances. Furieuse, elle décide de rendre visite à son père à l'aquarium où il travaille. Elle y rencontre Umi, qui semble avoir le don de communiquer avec les animaux marins...Sortie le 10 Juillet.
Je voulais que le film relève presque de l’hypnose. Et tout fut ainsi résumé. D’entrée de jeu, il faut le dire,
Les Enfants De La Mer est visuellement somptueux. En pâmoison devant le niveau de détails du dessin, la fluidité des mouvements et la sophistication des effets sous-marins, on a du mal à croire que le même studio ait pu, quelque temps plus tôt, nous livrer le valétudinaire morceau qu’est
Berserk. Malgré l’utilisation de moults raccourcis numériques plus compétents que la main humaine à retranscrire les phénomènes complexes de la faune et de la flore maritime, un effort herculéen a été consenti pour que la 2D donne le la et accapare le gouvernail à chaque fois que c’était possible ; en possession d’un budget semble-t-il généreux et d’une passion que l’on devine sincère, Studio 4°C atteint cette année l’apogée de son art. La dernière demi-heure, à couper le souffle, fait partie des plus impressionnants ballets animés que le Japon ait daigné réaliser durant la dernière décennie. En clair rien que pour ça, ça vaut le coup. A noter aussi, pour ajouter au canevas esthétique général, que la musique aux accents minimalistes a été composée par Joe Hisaishi, le célèbre compagnon de route du patriarche bougon de Ghibli.
Le scénario abscons ne mérite pas exactement les mêmes dithyrambes. Démarrant tel un
slice-of-life balnéaire assez conventionnel, il évolue progressivement vers une sorte de SF métaphysique dont les ambitions oscillent quelque part entre
2001,
Akira et
The End Of Evangelion ; le dernier spécimen en particulier lègue au script son Third Impact filandreux ainsi qu’un faux Kaworu tout en carton-pâte. De puissantes références pour sûr, mais simplement inatteignables en cela qu’à aucun moment le monde ou les personnages des
Enfants De La Mer ne montrent l’épaisseur qu’exigent de pareils modèles. L’anime déploie ses plus beaux atours et ne fait l’économie d’aucune phraséologie sentencieuse pour tenter de nous convaincre de l’existence d’une profondeur d’esprit en ses arcanes, mais passé l’âge de 14 ans, il sera un peu compliqué de voir autre chose en "
L’océan est le cosmos" qu’une coolitude superficielle roulant des mécaniques avec ses biceps de location. Et c’est en l’état tout le dilemme du film : en se mettant dans la peau d’un adolescent n’ayant que très peu goûté à ce que l’industrie de l’animation nipponne envoie à la chaîne depuis 1995, le spectacle mystique fonctionne et exerce même sa petite fascination. En
y allant comme nous sommes ©, cependant, il est fort probable de n’y voir qu’un grand bluff magnifique et inconséquent. Nul doute qu’au cours du long-métrage plus d’un spectateur permutera d’un état à l’autre et vice-versa, et qu'ainsi l’appréciation du tout s’en trouvera partagée, incertaine, erratique. Quoiqu’il en soit demeureront le tour de force technique et la fugace réminiscence d’un temps où la production japonaise représentait une alternative. C’est déjà pas si mal, m’est avis.